Je trouve une toute petite poupée dans le caniveau, la ramasse, lui souris.
Je la pose sur une grille en hauteur.
Un mec m'a regardé faire, de la cabine de son camion, l'air endormi.
Il doit me trouver bizarre.
Peut-être qu'il s'en fout.
Une femme promène son chien touffu sur le trottoir.
Un sapin de Noël sec est posé sur la terre nue.
Un peu tard pour jeter son sapin.
J'ai la chanson Lola dans la tête.
Je traverse au rouge et suis coincée entre deux files de voitures.
Je regarde le ciel.
J'ai pas l'habitude de regarder la météo.
Une jeune et belle gothique fume discrètement sur le quai du métro.
Un sourire aux lèvres.
Un frisson me parcourt à l'idée qu'elle pourrait se jeter sur les rails.
Et que c'est peut-être ce projet qui la fait sourire.
Mais non.
Un homme qui lit m'empêche de rentrer. Je lui roule sur le pied avec ma valise.
Et lui dis merci.
Un autre homme descend en le saluant poliment. Si ça s'trouve il était sympa en fait.
Une métisse me tient la porte en haut des escaliers. C'est gentil merci.
La verrière de la Gare du Nord paraît vieillotte maintenant.
Une silhouette aux cheveux longs et raides.
J'ai la chanson Lola dans la tête.
Trois agents sortent du bureau d'information en uniforme, par ordre décroissant.
Le dernier est nain.
Il n'y a personne dans la queue pour accéder au train.
Je ne fais pas passer ma valise aux rayons X.
Je ne sais pas pourquoi.
J'ai la chanson Lola dans la tête.
Sur le quai les lampadaires sont des grosses boules blanches.
Comme des chameaux.
Dans dromadaire y a deux d comme deux mais ils ont qu'une bosse.
Voiture 9. Les lampes du train sont rouges.
J'ai toujours Lola dans la tête.
Je laisse passer une ado.
Sa mère l'appelle Lola et lui parle espagnol. Je suis seule à ma place.
Faut que je bosse. Moi qui aurais voulu être côté fenêtre.
Plus moyen que je bouge. Je suis bien dans mon couloir.
Tout le monde parle. Je vais jamais pouvoir m'entendre penser.
Ah si.
Et si la danse m'apprenait à goûter la poésie du continuum de mon existence?
Alors, on danse?