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Trop tard pour être une star


Je ne sais pas quel est l'équivalent masculin de rêver d'être une danseuse étoile...: être John Wayne dans un western? Un champion de boxe peut-être, un grand peintre, ou un penseur. Je sais : un chanteur adulé par une foule en délire. Et puis bon, dans le tas il doit bien y en avoir qui ont rêvé d'être Rudolf Noureev... c'est sûr.

Je ne sais pas non plus si toutes les petites filles ont un jour rêvé d'être une danseuse étoile... ça me paraît si évident que je ne me suis jamais demandé si certaines y avaient échappé... ma version à moi c'était plutôt Crazy Horse, m'enfin, c'est kif kif : de grandes danseuses, belles comme des déesses, souples, fluides, vivantes. De s stars quoi...

Et puis à 4 ans, je fais de la danse. Et souvent, pas toujours hein, il m'arrive d'y croire quand même, mais souvent, intérieurement, la sensation c'est plutôt éléphant dans un magasin de porcelaine malgré mes 22 kg toute mouillée et un certain sens de la grâce, ou alors, comment dire... marionnette mal maîtrisée? Sensation d'étrangeté, que le corps n'est pas tout à fait adapté aux gestes demandés, ou ne les comprend pas, a du mal à les intégrer, les digérer, les recréer... un bug dans le circuit...

Et puis finalement à 24 ans, je danse. Et je commence à me demander ce qui fait la différence entre faire de la danse et danser. Et pourquoi quand je danse librement, j'ai parfois cette sensation divine d'être une star, même échevelée, en sueur et rougeaude, et sans même que qui que ce soit ne me regarde...

Une chose est sure : il serait faux de croire que l'absence totale de consignes soit le chemin le plus court vers la liberté. Car sans contraintes, grand est le risque que nos complexes mènent la danse: je vous laisse imaginer le désastre... on est parfois plus proche de la prison turque que de la scène de l'Opéra... Non. c'est plus une question de liberté intérieure.

Je ne peux pas non plus mettre l'aiguille sur la jauge du plaisir : ça équivaudrait à ôter toute puissance créatrice à la douleur, la colère, la rage, la tristesse, la honte, le désir désespéré, l'amour inassouvi, l'amour tout court d'ailleurs, la liste est longue, et par la même occasion faire une croix sur l'histoire de tous les arts confondus. Voire même sur l'histoire de l'humanité. Trop radical pour être une solution.

Et si la différence entre faire de la danse et danser venait de la source? Le danseur libre, serait cet être qui apprend à laisser émerger le mouvement, chorégraphié ou non, de sa source intérieure, énergie infiniment renouvelable, complexe et multiple, en relation avec les aléas du destin, des autres, de la vie, sans en dépendre. Le danseur libre serait alors cet être capable de laisser émerger de toute circonstance, interne ou externe, un mouvement capable de renforcer ses ressources plutôt que de les épuiser, de briller pour lui-même dans le clair-obscur de son humanité. Jamais trop tard pour être une star.

Alors, on danse?


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